Cela fait plusieurs années que les gens attendent un jeu se déroulant dans le Japon féodal, la première apparition de Ghost of Tsushima en 2017 a donc suscité de l'intérêt, beaucoup d'intérêt. D'autant que le titre était du fait des développeurs d'Infamous. Sucker Punch a complètement changé de cadre mais l'attente a valu le coup même si le studio n'aura pas su exploiter tout les changements positifs que le genre a subi depuis Infamous : First Light, sorti en 2014.
L'un des aspects qui n'a pas été modernisé, à mon grand plaisir, est la manière dont l'histoire est racontée. Nate Fox et son équipe ont répété maintes fois qu'ils s'inspiraient grandement du travail de Akira Kurosawa et d'autres cinéastes japonais, et le résultat est là. Les grandes lignes ont déjà été vues et revues : un homme à la poursuite de vengeance. La nouveauté réside dans la façon dont le protagoniste, Jin Sakai, décide de dévier des traditions et valeurs samouraï pour avoir une chance de vaincre les envahisseurs mongols. Même si l'histoire débute lentement, le rythme accélère, surtout lors de la seconde moitié, lorsque les conséquences de ce changement de mode opératoire apparaissent.
Un bon système de combat est crucial dans un jeu autour des samouraïs, et les progrès effectués depuis les titres Infamous sont bluffants. Vos ennemis mais aussi vous, pouvez être tués en quelques coups d'épée, rendant les blocages et les parades essentiels. Le State of Play laissait croire que les ennemis attendraient que vous terminiez vos attaques pour en lancer. Mais rassurez-vous, ce n'est absolument pas le cas dans le jeu final. Si vous essayez de forcer la garde d'un ennemi, préparez-vous à en subir les conséquences. Mais vous avez également à disposition des compétences pour éviter ces contres dévastateurs. Avec un bon timing, vos blocages ou esquives étourdiront l'ennemi, créant une faille pour votre katana. Avec un timing parfait, l'ennemi sera complètement dans le vent et vous pourrez l'achever d'un coup cinématique spécial.
Mais gérer tout cela devient très dur lorsque vous êtes face à un groupe d'ennemis. Il serait stupide d'attaquer une brute avec un énorme marteau et un Ronin de la même manière non ? C'est ici qu'interviennent les quatre styles de combat. Ils sont chacun efficaces contre un type d'ennemi. L'un marchera à merveille contre les ennemis dotés d'épées mais sera quasiment inefficace contre ceux équipés d'une lance. Les groupes d'ennemis sont souvent composés de types différents, il sera donc très important de passer d'un style à l'autre sans oublier d'utiliser vos kunais et vos fumigènes. Le système est intuitif et relativement simple à apprendre.
Ghost of Tsushima n'est pas nécessairement un jeu où les affrontements commencent par vous qui courez sur les ennemis avec votre épée. Vous avez aussi la possibilité de défier vos ennemis à un duel entre vous et trois (et jusqu'à cinq si vous améliorez la compétence) mongols. Vous vous ferez face, à la Kurosawa, avec gros plans sur les yeux et les armes inclus. Il faut être très vigilant et avoir le doigt posé sur triangle en attendant que votre premier assaillant amorce son attaque. Encore une fois, un bon timing permettra de tuer en un coup chaque membre du groupe ennemi mais la moindre erreur pourra vous coûter très cher. Peut être trop risqué pour certains, qui préféreront choisir une approche plus discrète.
L'infiltration n'est probablement pas la première chose à laquelle on pense lorsque l'on a un jeu de samouraï sous la main, pourtant, c'est de cette façon que Sakai-san s'éloigne des traditions de son clan. Libérer un fort sera quasiment infaisable si vous arrivez simplement par la grande porte en défiant la garnison entière. En revanche, escalader un mur avec votre grappin et éliminer silencieusement les gardes est bien plus efficace. Détourner l'attention d'un groupe d'ennemis avec des feux d'artifice pour éliminer un archer surplombant votre position avec votre arc l'est également. Si vous n'êtes toujours pas détectés, vous pourrez même aller vous débarrasser du groupe réuni autour de votre distraction avant de disparaitre dans les hautes herbes, sans que personne n'ait la moindre idée de votre présence. Incarner un samouraï est cool. Mais incarner un samouraï-ninja est juste mieux !
Peu importe l'approche que vous choisissez, les sensations sont là. Et le jeu est beau. Si beau que s'arrêter pour exploiter le mode photo afin de garder un souvenir de ce que vous venez d'accomplir en vaut largement la chandelle. Les animations ne sont pas les meilleures du marché, mais le titre se rattrape largement grâce à son monde visuellement époustouflant, à une excellente gestion de la lumière et à un sound design fabuleux. L'archipel japonais est coloré et resplendit des lumières du Soleil le jour et de la Lune la nuit. Ghost of Tsushima exploite l'HDR au maximum. Que ce soit lorsque Jin marche dans un champ dont les pétales virevoltent dans l'air ou bien lorsque l'on observe le contraste entre l'herbe verte et des fleurs rouges. Les panoramas sont partout et je me suis surpris plusieurs fois à regarder lentement autour de mois comme si je montrais le jeu lors d'une conférence de presse tellement le titre est un bijou visuel.
De plus, le mode photo rend encore plus justice au travail fourni sur les graphismes avec une multitude d'options permettant de changer l'angle de caméra, la mise au point, l'heure du jour, les expressions faciales et plus encore. J'ai vraiment hâte de voir ce que la communauté créera avec ce outil lorsque le jeu sera sorti. Il y a même un filtre noir et blanc Kurosawa si vous êtes adepte du cinéma japonais classique ! Ghost of Tsushima est probablement l'un des plus beaux jeu de cette génération.
Mais les graphismes ne suffisent pas toujours. Un monde ouvert doit proposer des activités en dehors de la trame principale et des missions annexes. Le jeu a de tout pour meubler. Si vous voulez vous reposer après une grande bataille, partez à la recherche d'une source chaude et écoutez Jin réfléchir sur un thème pendant que sa vie se régénère. Pour plus de compétences, vous devriez essayer de trouver un autel du renard pour améliorer l'efficacité de vos charmes (sortes d'atouts). Vous épuisez souvent votre rune qui vous permet d'utiliser vos capacités spéciales ? Améliorez votre dextérité via des QTEs. Envie de changer de look peut être ? Vous trouverez probablement de l'équipement en escaladant une montagne. Pour approfondir votre connaissance du monde, regarder autour de vous pour peut être tomber sur des accessoires mongols qui vous en apprendront plus. Il y a énormément d'items de personnalisation dispersés partout sur la carte mais malheureusement, les activités deviennent vite répétitives.
Ne vous méprenez pas. Ghost of Tsushima est un très bon jeu, mais il a du mal à tenir la route face aux meilleurs en ce qui concerne la manière dont le monde divertit. Tout en restant visuellement magnifique, certaines zones donnent l'impression d'avoir été bêtement copiées / collées. Les camps mongols n'auront plus aucun secret pour vous après que vous en ayez complété deux, et après trois heures de jeu, vous aurez vu tout les ennemis que le titre a à vous offrir, libéré le seul otage que les mongols continueront de kidnapper pendant tout le jeu, enfin, vous avez saisi.
La même chose s'applique aux missions. Allez de A à B, éliminer un groupe d'ennemis, peut être enquêter sur quelque chose avec vos pouvoirs de Daredevil et attendez que le bandeau de la quête disparaisse pour reprendre le contrôle de Jin. Il y a quelques variations très intéressantes mais elles sont trop peu nombreuses.
Et le jeu n'est pas non plus dénué de soucis techniques. Le clipping (deux objets qui "fusionnent") ruine l'immersion. Les zooms sur le visage de Jin marcheraient mille fois mieux si le manche de son katana ne traversait pas son armure ou sa cape. Les animations ont aussi quelques problèmes : des ennemis qui tournent en rond, un garde qui change brutalement de position après s'être fait tué...
Ensuite, parlons des temps de chargements, très longs sur PS4 comme sur PS4 Pro. Si les temps de chargements entre les morts et pour le voyage rapide sont assez courts, ce sont les dialogues qui pêchent. Lancer une conversation avec un personnage affichera un écran noir pendant quelques secondes avant que la caméra ne reprenne un angle plus cinématique et rebelote à la fin du dialogue. Si il s'agit d'une mission, vous devrez attendre encore plus longtemps. Enfin, voir un mongol et un ours être parfaitement immobiles jusqu'à ce que je m'approche suffisamment pour qu'ils se mettent à se battre est une cerise un peu périmée sur un gâteau pourtant très bon.
Ces éléments au détriment du jeu sont vraiment, vraiment dommage, car les autres apsects de Ghost of Tsushima sont plus que réussis. Le jeu est visuellement époustouflant et peu de titres réussissent à mélanger style et substance de cette façon. Jongler entre les différents styles de combat est un ballet délicieux. Opter pour une approche plus discrète est tout aussi gratifiant. Il faudra juste fermer l'œil sur les quelques problèmes de clipping et les animations un peu rigides, sans oublier de prendre son temps car l'aventure pourra vite devenir répétitive. Ainsi, votre expérience sera bonne et vous profiterez pleinement de votre vie de samouraï dans un Japon médiéval brillamment recréé.