Pendant qu'un ours sauvage s'en prend à nos ennemis, on s'équipe de notre lance-roquettes et on charge l'ogive. Les pales d'un hélico qui nous survole et s'apprête à nous descendre, se font entendre : on vise, on tire et l'appareil s'écrase sur ce qu'il reste de nos assaillants. Bon sang, il n'y a rien de plus jouissif dans Far Cry, que lorsqu'un plan se déroule sans accroc.
C'est le début de la fin pour le comté de Hope County, situé dans le Montana. Un culte nommé « Le Projet d'Eden's Gate » a pris le contrôle de la région et a coupé toutes les communications vers le monde extérieur. Le jeu débute avec l'arrestation du chef de cette secte, Joseph Seed ou « Le Père » comme l'appellent ceux qui le suivent. Vous êtes un des agents fédéraux chargés de mener cette mission, mais quelques altercations plus tard, vous finissez par fuir. L'arrestation se transforme donc en mission de sauvetage, pour vos collègues.
Après nous avoir emmenés dans des îles paradisiaques, dans la savane africaine et les montagnes de l'Himalaya, la franchise Far Cry s'aventure pour la première fois dans une région reculée des États-Unis d'Amérique ! Le décor n'est clairement pas aussi exotique que ce qu'on a pu voir dans le passé de la licence. Ici, vous vous retrouvez au milieu des pins, des lacs, des champs et des ranchs. Un choix de world-design différent, mais qui n'en demeure pas moins excellent. Dans ce nouvel opus, chaque personnage que vous allez rencontrer transpire le cliché de l'américain moyen. Le jeu d'ailleurs, est lui-même imprégné par cette atmosphère, bref, bienvenue chez les rednecks.
Il y a peu de choses à dire sur la structure du monde ouvert de Far Cry 5, qui vous permet de réaliser n'importe quelles missions dans l'ordre que vous voulez. Après avoir libéré une petite île au centre de la carte, le tutoriel, vous avez accès aux trois grandes zones du jeu. La grande différence avec les titres précédents, c'est que la plupart des activités vous récompensent avec des points de résistance, qui déclenchent la progression dans le récit principal. On retrouve clairement dans cette manière de faire, l'influence de Tom Clancy's Ghost Recon Wildlands.
Les trois régions que vous allez parcourir sont sous la coupe des lieutenants de Joseph Seed, qui sont également ses frères et sœurs : Jacob, John et Faith. Chacune des zones de la carte a sa propre ambiance avec un thème légèrement différent à chaque fois. Jacob, l'aîné, se charge de la formation des soldats de la secte et se trouve dans les montagnes du comté. Faith, elle, utilise plusieurs drogues psychotiques pour transformer les gens en zombie, appelé « ange », et les contrôler. John, lui, se charge de purifier les péchés des membres de la secte : plus façon chalumeau et pince-arrache-dent que sermon et prière d'ailleurs. Au fur et à mesure que vous progressez dans chaque région, votre niveau de résistance augmente et les choses deviennent de plus en plus dramatiques. En effet, plus vos exactions envers les propriétés d'Eden Gates avancent, plus leurs membres seront agressifs en vous apercevant.
Il n'y a pas de grande différence entre les régions, vous y ferez, grossièrement, les mêmes choses : sauvetage de prisonnier, prise d'avant-poste et destruction de bien culturel sont au rendez-vous. Sans oublier les nombreux affrontements aléatoires avec les illuminés de la secte.
En parlant de combat, comme vous vous en doutez, vous avez l'embarras du choix. L'arc possède différente flèches, quelles soient explosives ou incendiaires. Mais si vous voulez faire du bruit, vous aurez l'occasion de vous amuser avec un lance-roquettes ou des explosifs télécommandés. Pour les plus précautionneux, descendre des ennemis à distance sera toujours possible à l'aide des nombreux fusils de sniper. Il n'y a rien de vraiment nouveau ici, en comparaison avec ce à quoi la licence nous a habitués. Le jeu de tir lui-même est ce que vous attendez d'un Far Cry, même si certains ennemis ont tendance à être des éponges à balles (ce qui n'est pas plus mal, ça vous force à avancer et à les attaquer de manière tactique). L'environnement se prête également à l'affrontement. N'hésitez pas à lâcher un cougar ou un ours sur vos adversaires pour créer la panique dans leur rang et en tuer un ou deux au passage. Vous pourrez aussi compter sur Boomer, votre fidèle compagnon a quatre pattes, pour mettre toutes les chances de votre côté et réussir votre assaut.
Les PNJ de votre groupe sont la grande nouveauté de ce cinquième opus (tout comme la location d'arme). Dans l'ensemble, il y a neuf compagnons que vous rencontrerez dans le comté de Hope. Du tank de Cheesburger à l'avion d'Adelaide, en passant par les talents de sniper de Jess : chacun d'entre eux à quelque chose à vous offrir. Ces IA amènent également une touche comique dans le scénario, chaque phrase que prononce Hurk et Adelaide sont des punchlines hilarantes. Vous pouvez les diriger et leur donner des ordres, qu'ils exécutent sans sourciller (après tout, c'est vous l'officier fédéral !) On a toutefois remarqué que, livrés à eux-mêmes, ils ne prennent pas toujours les bonnes décisions. Que ce soit pour votre santé, ou pour la leur ! Durant notre partie, notre compagnon à attirer des hélicoptères alors que nous étions en fuite. À un autre moment, alors que nous résolvions une énigme pour accéder à une cache d'arme, nous l'avons littéralement transformé en bacon grillé en activant une plaque électrique qu'il n'avait pas vu.
Vous l'avez compris, vos compagnons ne remplaceront jamais le plaisir qu'on éprouve à jouer avec un ami dans cet open-world simpliste, mais brillamment conçu. Votre coéquipier va garder les points de talent (le système de progression de votre personnage dans Far Cry 5) mais ne gagnera aucun point de résistance dans leur campagne. Logique quand on y pense, puisqu'ils sont invités dans votre partie en tant que soutien. Il s'agit là d'une approche plus décontractée de la coopération, mais qui fonctionne : les choses deviennent beaucoup plus faciles avec un ami (et beaucoup plus fou). C'est un excellent moyen d'avancer rapidement dans la progression de l'histoire, ou de vous attaquer à un avant-poste qui vous a donné du fil à retordre.
Nous avons mentionné un certain nombre de choses ci-dessus qui méritent sans doute plus d'explications. Les points de talent que vous pouvez gagner de plusieurs façons, par exemple, vous permettent de faire évoluer votre arbre de compétence. La plupart de ces capacités sont disponibles dès le début, mais certaines nécessitent de progresser dans l'histoire principale pour les déverrouiller. Dès le départ donc, vous avez l'occasion de vous faire un build performant selon votre manière de jouer. Pour avoir les moyens de débloquer ses compétences, le mieux reste encore de fouiller chaque lieu à la recherche de goodies, de clé ou de magazines. N'hésitez pas, à ce propos, à résoudre chaque énigme des caches d'armes que vous allez avoir l'occasion de croiser. Bien souvent, ça vaut le coup de se creuser les méninges ! Pour obtenir l'arc à poulie nous avons dû tirer depuis une cinquantaine de mètres, à travers une fenêtre, sur la serrure de la porte qui nous bloquait son accès.
Chaque cachette contient non seulement du matériel, mais également des points sous forme d'item. Trouver comment en déverrouiller l'accès offre souvent des pauses dans l'intensité de l'action quasiment omniprésente. Croyez-nous, elles ne sont pas toujours simples à débloquer, vous risquez donc d'y passer un petit moment à chaque fois avant de trouver la solution ! Si vous avez aimé les tombeaux dans Assassin's Creed Origins ou dans Rise of the Tomb Raider, les caches d'armes vont vous plaire. Il ne faut pas non plus oublier les parties de chasse et de pêche, qui vous permettront d'accumuler du butin à revendre.
Dans l'ensemble, les différentes activités se mélangent bien (le thème musical des courses acrobatiques avec Clutch nixon est inoubliable). Même si on vous annonce dès le tutoriel que vous n'aurez pas à grimper à des centaines de tour, c'est à moitié vrai : vous allez devoir désactiver le brouillage de certaines tours radio. La différence avec les opus précédents, c'est qu'ici, elles ne débloquent pas des missions ou des activités, ce sont des objectifs à part entière. Les missions, elles, vous sont données par les habitants et les résistants de Hope County, ce qui vous pousse à vous intéresser à tous ceux que vous croisez. Si les miliciens sont parfois aussi cruels que le culte, vous allez tout de même finir par les apprécier.
Joseph Seed est un protagoniste brillant, avec un charisme qui écrase largement celui de Vaas dans Far Cry 3 (et qui avait offert une renaissance de la série à l'époque). Les lieutenants du « Père » apportent également quelque chose d'original, de différent et de diabolique à chaque rencontre. Le récit lui-même est sombre et il convient de féliciter Ubisoft pour la réalisation d'un scénario aussi dynamique et aussi profond. Si le thème religieux peut en décourager plus d'un, rassurez-vous, il est loin d'être évangélique.
Comme vous l'avez peut-être compris, nous avons vraiment apprécié notre séjour dans à Hope County, même s'il y a eu quelques problèmes par-ci, par-là. Nous avons dû relancer une poignée de missions car elles ne se sont pas terminées comme elles auraient dû. Nous avons également eu un incident où nous ne pouvions pas quitter la mission et où nous avons dû faire exprès d'échouer en boucle avant d'en avoir la possibilité.
Rien de surprenant, c'est quelque chose auquel on s'attend avec des jeux sandbox de cette ampleur. L'intelligence artificielle des compagnons et les mécaniques de tir laisse à désirer cependant, de même que la conduite. Pas d'inquiétude à avoir néanmoins, on retrouve vite les sensations et l'habitude de la physique des véhicules après avoir joué quelques heures. La présence des « anges », ou plutôt des zombies comme il convient de les appeler, est un peu hors sujet. Au niveau du gameplay, ils demandent plus de proximité et d'investissement. C'est donc une manière originale de nous forcer à changer notre façon de jouer. Mais honnêtement, ce n'était vraiment pas nécessaire de les inclure dans le jeu. Heureusement, ils ne sont présents que dans la zone de Faith. De plus, certains moments sont un peu trop linéaires, ce qui renforce le scénario bien sûr, mais il clair que le jeu est meilleur quand le joueur a la liberté d'aborder une situation comme il l'entend.
Graphiquement, on ne peut pas se plaindre, nous dirions même que nous n'en avons pas le droit : c'est superbe. L'aspect sauvage et naturel du Montana est magnifiquement recréé. Quand on prend de la hauteur, certains visuelle sont à coupés le souffle. On regrette néanmoins deux choses : le manque de visibilité pour certains animaux, notamment les carcajous, qui nous ont sautés à la gorge sans que nous ayons pu les voir venir. Et le manque de diversité dans les visages des membres du culte. (Se faire accoster par des sextuplés barbus à chaque virage casse l'immersion).
Niveau sonore, ce sont les bruits des tirs, des explosions et des véhicules qui rythment le jeu. Vous aurez néanmoins l'occasion de faire fonctionner la radio si vous voulez changer l'ambiance, mais attendez-vous à rester dans de la country agrémenter de guitare folk ! Le doublage des personnages est correct. Nous tenons cependant à faire nos hommages à l'acteur qui a doublé Adélaïde et qui a dû, de ce fait, enregistrées des blagues et des insinuations sexuelles extrêmement gênantes.
Nous n'avons pas mentionné le mode Arcade de Far Cry 5, qui s'impose comme le véritable multijoueur de cet opus. Celui-ci détient un éditeur de cartes qui contribue à la liberté et à la créativité de ce mode. Ce dernier contient d'ailleurs des fonctionnalités de titre comme Assassin's Creed Origins et WatchDogs 2. On ne vous en dira pas plus ici. Si ce n'est pas ce qu'il y a de plus intéressant à faire dans ce jeu, cela reste tout de même un gros morceau : trop conséquent pour être juste évoqué et qui méritera un futur article de notre part.
D'un point de vue global, Far Cry 5 nous sert un scénario prenant et mémorable. Ce qui fait le prestige de cette licence, c'est bien souvent le charisme des méchants que nous affrontons et force est de constater que ce cinquième épisode ne fait pas exception. Comme expliqué précédemment, Joseph Seed met facilement à l'amende Vaas (encore considéré aujourd'hui comme l'icône des psychopathes que l'on a dû affronter dans tous les Far Cry confondues). Le gourou d'Eden Gates a autant l'allure d'un messie de dieu, que du diable. En résumé, c'est une expérience formidable, qui est bien sûr loin d'être parfaite, mais tous les fans de la série crieront au chef-d'œuvre. Et puis, dites-vous que si la fin du monde approche vraiment, au moins vous aurez à vos côtés un ours diabétique nommé Cheesburger.